Sauvagerie - J.G.Ballard

Ballard

- Éditions Tristam -

Pangbourne Village est un enclos résidentiel de luxe près de Londres, où une dizaine de familles aisées – directeurs généraux, financiers, magnats de la télé – vivent en parfaites harmonie et sécurité. Jusqu’au jour où l’on découvre que tous les enfants viennent d’être kidnappés et leurs parents sauvagement massacrés. Deux mois après les faits, les enlèvements ne sont toujours pas revendiqués. Les enquêteurs sont dans l’impasse. Impuissants, ils se repassent avec effarement la vidéo tournée sur la scène du crime. La froideur méticuleuse des assassinats ajoute à l’impression d’être en présence d’une tuerie hors norme. La police décide de faire appel à un psychiatre, le docteur Richard Greville, pour reprendre l’enquête.

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Ce texte comme une nouvelle, moins d’une centaine de pages glaçantes, qui bousculent, ne laissent pas de répit même après lecture. Des pages glaçantes par le ton, les faits, le sujet; des faits qui bousculent non par l’enquête, son cheminement – il ne s’agit pas ici de suspense ou de descriptions d’horreurs complaisantes – mais effrayants par leurs causes et conséquences.

Ce court récit présente les extraits du journal médico-légal du docteur Greville. Il tient à la fois du rapport et de l’analyse personnelle.

Le sujet en est évidemment l’ultra-sécuritaire, ces îlots modernes en ghettos paranoïaques d’une classe sociale qui souhaite créer un univers lisse à son image de réussite socio-économique, un monde totalement sous contrôle. Le propos est donc sociétal. Il y a le frisson de l’anticipation sur ces pages puisque ce texte date de 1988… Il pose des questions dérangeantes quant à notre perception du monde, ce monde contemporain dans lequel nous faisons vivre nos enfants, façonnant alors leur propre vision. Quelle réalité leur transmet-on, quelle part de réel pour quelle part de fantasme, de volonté de les protéger, de les armer ? Modeler leur univers, les modeler. Éradiquer la violence, l’incertitude, l’erreur. Bloquer les doutes, les erreurs, les faiblesses par ces  » réseaux  » de fils technologiques de la surveillance et par la fameuse liberté de paroles qui ne libère rien du tout. Blockhaus et blocus. De la doctrine de secte. De l’utopie et de la dictature, de l’éducation de carton pâte où chacun doit s’appliquer à son rôle de vie modèle en harmonie avec ce  » meilleur des mondes  » qui ferait rire de la pantomime si elle n’engendrait pas la tragédie.

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